Quand, en mai 1936, la galerie Charles Ratton présente l’« Exposition surréaliste d’objets », cette exposition cherche à démontrer la capacité du surréalisme de transfigurer le réel, sans pour autant le métamorphoser. Les objets exposés – objets mathématiques, objets trouvés et interprétés, objets d’Amérique ou d’Océanie – sont tous des objets qui n’ont reçu aucune modification, aucune transformation et sont, quand même, élevés au rang du merveilleux surréaliste. Comme le dira André Breton dans le Dictionnaire abrégé du Surréalisme en 1938 : ce sont les poètes qui en font un « objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le simple choix de l’artiste ». De nombreuses études et la récente exposition « Le surréalisme et l’objet » du Musée national d’art moderne, Centre Pompidou en 2013, ont depuis souligné le paradoxe inhérent entre le domaine du rêve et de l’imaginaire d’un côté et la réalité matérielle de l’autre.
Dans le cadre d’un workshop, nous nous proposons de nous intéresser tout particulièrement à l’objet « sauvage ». Celui-ci, qu’il vienne d’Océanie, d’Afrique ou d’Amérique du Nord, prend une place importante non seulement dans le surréalisme, mais aussi dans les collections des poètes et des artistes. Au-delà de leur magie, ces objets possèdent une valeur d’échange concrète. Roland Tual, le premier gérant de la galerie Surréaliste qui ouvre ses portes en 1926, est en contact avec les marchands berlinois des arts premiers Hildebrandt Gurlitt et Karl et Josef Nierendorf pour le commerce des objets océaniens et africains. Paul Eluard est toujours à la recherche d’objets qu’il peut revendre à des marchands parisiens tel Charles Ratton. La correspondance avec Gala témoigne du fait que le collectionneur vise la revente des objets dès son premier achat. André Breton, considère également ces objets, en dehors de toute qualité esthétique, comme éléments d’une activité de courtage, dont il vit.
Notre workshop propose d’étudier ces aspects moins connus de la fascination pour les arts premiers. Les surréalistes contribuent à transformer les régimes de valeur de ces objets entre leurs qualités imaginaires surréalistes et leur réception occidentale. L’analyse des collections des poètes et artistes surréalistes, nous aidera à mieux comprendre comment la vie et l’art sont, de cette façon, étroitement liés. Par exemple, quelle est la place d’un marchand comme Julius Carlebach dans l’économie autant complexe que subtile de la vente d’œuvres de surréalistes et d’objets extra-occidentaux ?
Comment la discipline de l’ethnologie évolue-t-elle au regard du surréalisme? La disposition muséale des collections ethnologiques représente-t-elle des sources d’inspiration pour les collections des surréalistes ? Quels types de rapport entretien le surréalisme avec les arts d’ailleurs?
La journée d’études s’adresse notamment aux jeunes chercheurs. Elle s’inscrit dans le cadre d’un programme de recherché intitulé «Le surréalisme au regard des galeries, des collectionneurs et des médiateurs, 1924-1959» et fait suite aux journées d’études qui se sont déroulées les 11 et 12 mars 2016 et les 7 et 8 novembre 2014 au Centre allemand d’histoire de l’art à Paris.
Un appel à candidature est lancé jusqu’au 15 juin 2016. Les intéressés devront envoyer une courte présentation de leur projet (maximum une page) en langue anglaise, allemande ou française, ainsi qu’un bref cv.
Julia Drost, Centre allemand d’histoire de l’art, Paris, jdrost@dfk-paris.org
Fabrice Flahutez, Université Paris Ouest, fflahutez@u-paris10.fr
Martin Schieder, Universität Leipzig, schieder@uni-leipzig.de
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Surréalisme et arts premiers
Workshop au Centre allemand d’histoire de l’art, avec le soutien de l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’investissements d’avenir du laboratoire d’excellence Labex Arts-H2H (ANR-10-LABX-80-01).
10 octobre 2016
Conception : Julia Drost, Fabrice Flahutez, Martin Schieder
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