Caricatures et cultures numériques II : « L’heure est grave »
Musée McCord Stewart et l’Université du Québec à Montréal
La caricature jouit d’une notoriété et d’une polyvalence croissantes en tant qu’action satirique de choix dans presque toutes les sociétés contemporaines. Lancinante, violente, drôle, désopilante, impudente, et parfois même sage, la satire visuelle porte aussi le poids de son histoire et des usages qu’en font ces sociétés.
Polémique, elle oscille entre le comique et le tragique, participant à la circulation d’actes et de pensées subversives face à l’autorité des gens et des institutions de pouvoir. Elle peut proposer consensus face aux transformations sociales, économiques, politiques, culturelles d’une collectivité. Elle est aussi œuvre artistique : elle joue sur la représentation mimétique virtuose et la pensée critique.
La caricature est à la fois œuvre matérielle et même immatérielle: dessinée sur papier, sur ordinateur, imprimée sur des feuilles volantes depuis la Renaissance, popularisée par la presse de masse depuis le XIXe siècle, et diffusée, depuis le tournant du XXIe siècle, dans Internet et sur les réseaux sociaux. Les images satiriques sont devenues des phénomènes de l’instantanéité des communications globales. Elles entrent dans le climat de violence sociale tout aussi globale, qui s’étend des discours jusqu’à la mise en danger de la vie des caricaturistes. Paradoxe ou non, leur importance croissante se mesure en proportion inverse au soutien de plus en plus fragile de l’industrie qui leur avait depuis longtemps été synonyme, l’industrie des médias de masse.
La satire visuelle participe à la mémoire collective : elle est devenue objet patrimonial et de valorisation par les musées, les archives et les bibliothèques. En même temps, ces institutions sont aussi en lutte permanente pour protéger les conditions de leurs fonctions essentielles. Elles adoptent l’inscription de leurs collections dans l’univers numérique afin de les rendre accessibles au plus grand nombre possible.
Comment pouvons-nous comprendre la volonté institutionnelle de conserver, de protéger et de rendre accessible les caricatures à l’époque des cultures numériques? Conserve-t-on l’œuvre caricature ou l’ensemble des comportements culturels qui s’y rattachent? Comment l’environnement et les outils du numérique façonnent-ils les pratiques et la recherche? Quelle histoire et quelle actualité de la caricature sont favorisées par les volontés institutionnelles dans l’univers des Humanités numériques et pour quels usages? Quels impacts peut-on prévoir sur la création, la diffusion et la conservation des caricatures dans le contexte de l’intelligence artificielle?
Voilà la problématique que nous souhaitons aborder des points de vue des caricaturistes, des chercheur.es et des gens des institutions pour ce second volet dans le cycle de colloques internationaux « Caricatures et cultures numériques ». Après Lausanne en 2022, c’est à Montréal que les réflexions se poursuivent, cette fois-ci au Musée McCord Stewart, institution phare de la mise en collection, la numérisation et la valorisation des caricatures au Canada. Cette première rencontre dans les Amériques sera l’occasion d’inviter plus particulièrement des collègues des collectivités hispanophone, lusophone, anglophone et francophone des deux continents à partager leurs créations, leurs recherches, leurs expériences et leurs projets, en vue du développement de projets collaboratifs de mise en commun des pratiques et des recherches. En même temps, les organisateurs du colloque s’adresseront à la communauté internationale dans l’objectif de fonder un réseau d’études sur la satire visuelle qui pourra poursuivre ces efforts au-delà de l’horizon de ce cycle de colloques dont la prochaine édition se tiendra à Lyon en 2025.
Sur le projet voir :
– Laurent Baridon, Dominic Hardy, Philippe Kaenel, « Caricatures et cultures numériques : un nouveau champ de recherche », Sociétés & Représentations, 2023/1 (N° 55), pp. 339-348https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2023-1-page-339.htm
– https://wp.unil.ch/caricaturedigitale/
Les propositions de communication, qui ne dépasseront pas 300 mots et qui seront accompagnées d’un court résumé bio-bibliographique (100 mots maximum), sont attendues pour le 15 mars 2024 à l’adresse suivante :
caricaculturenumeriquemtl@gmail.com
Les décisions seront communiquées le 1er avril.
Il est l’intention du comité d’organisation de faire paraitre, au plus tard en 2026, une publication en ligne à partir de versions enrichies des textes des communications retenues.
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