Cette journée d’études, pensée en regard de l’exposition « Biskra, sortilèges d’une oasis » actuellement présentée à l’IMA, propose de questionner la manière dont le medium exposition parvient à faire face aux enjeux théoriques, historiques et critiques qui sous-tendent les problématiques coloniale, postcoloniale et décoloniale. Comment présenter un territoire tel que Biskra dans un espace muséal français encore largement tributaire d’un imaginaire colonial ? Les œuvres, objets et documents d’archives sélectionnés se doivent d’être soumis à plusieurs prismes afin de démêler et déconstruire, grâce à l’analyse, les visions orientalistes, coloniales et postcoloniales, esthétiques et politiques. Seront ainsi questionnées la multiplicité des objets mis en exposition et leur situation dans des dispositifs de médiation, leur valeur en tant que sources historiques et anthropologiques, leur pouvoir en tant que matrice d’une autre mise en histoire, celle d’une Algérie nationaliste. Cette démarche scientifique vient faire écho à des enjeux politiques et épistémologiques très actuels qu’il conviendra de resituer.
Biskra, ville du Nord de l’Algérie, a été l’objet d’une construction spécifique dans la culture visuelle et l’imaginaire européen. Ce territoire, réel et fantasmé, fut, d’André Gide et Henri Matisse à Béla Bartók, un lieu important pour la communauté artistique et littéraire occidentale. Les matériaux présentés dans l’exposition, majoritairement créés sous l’impulsion d’un mouvement orientaliste, présentent la complexité d’objets produits, perçus et pensés dans des temporalités, des idéologies et des espaces pluriels. Est-il possible de réaliser une exposition sur Biskra aujourd’hui avec ces images européennes et françaises en privilégiant une véritable position critique ? ou le déterminisme historique et esthétique est-il tel qu’il enrobe la réalisation et la réception de la manifestation soumise à l’institution et à la diplomatie ?
Ouverte sur un dialogue interdisciplinaire, cette journée d’études s’attachera à l’analyse de la pluralité des grilles de lecture applicables aux expositions récentes d’objets liés à la période coloniale. On y abordera la manière dont l’imaginaire collectif, les mémoires et histoires mêlées entrent en relation et appellent une nécessaire (re)contextualisation des objets réinvestis par des approches critiques et des outils théoriques renouvelés.
Pensée en deux temps, cette journée s’articulera d’abord autour d’études de cas liées à l’exposition de l’IMA et des thématiques qui y sont abordées, puis elle sera l’occasion d’interroger plus largement l’écriture de l’histoire coloniale et postcoloniale par l’exposition. La journée sera dirigée par le groupe des neuf boursiers du Centre allemand d’histoire de l’art, qui animeront les discussions.
Une exposition en débat : « Biskra, sortilèges d’une oasis »
22 novembre 2016
PROGRAMME
9h Introduction Emilie Goudal et Nicolas Schaub
Session 1 Biskra : visions d’une oasis
modération Emilie Goudal
9h30 Marie Gautheron
Gustave Guillaumet, de la représentation de la « Pacification » de l’Algérie à celle d’une Algérie paisible
10h15 Colette Zitnycki
La mise en tourisme de Biskra et de l’espace saharien (fin du XIXe siècle aux années 1930) : un aspect de la domination coloniale ?
11h François Pouillon
Excursions fin de siècle à Biskra : ce que nous racontent Gide, Pierre Louÿs, Jean Lorrain
12h-13h30 : Déjeuner
Session 2 Exposer l’Algérie : perspectives plurielles et renouvellement
13h Table-ronde
modération Nicolas Schaub
Roger Benjamin
Récit de commissaire: les enjeux postcoloniaux de l’exposition Biskra.
Michel Megnin
Exposer les photographies orientalistes : retours sur l’exposition « l’image révélée » à Tunis
Marie-Laure Allain-Bonilla
Entre théorie et pratique, l’exposition postcoloniale, une utopie ?
Catherine David (à confirmer)
conclusion : Elvan Zabunyan
16h Visite de l’exposition Biskra, sortilèges d’une Oasis
Hôtel Lully
45, rue des Petits Champs
75001 Paris
Répondants : Emilie Goudal, Hanna Holtz, Laura Karp-Lugo, Judith Rottenburg, David Sadighian, Nicolas Schaub, Marine Schütz, Devika Singh, Annabela Tournon, boursiers du DFK Paris
Coordination scientifique : Emilie Goudal, Déborah Laks, Nele Putz, Nicolas Schaub
Image de couverture : Gustave Henri Marchetti, « Une visite aux Ouled-Naïls à Biskra » 1898, aquarelle, Paris, Roger Viollet, Inv RVB 931 483.
Leave a Reply
You must be logged in to post a comment.