Appel à publication : « Extra-terrestre », Image re-vues (automne 2016)

Extra-terrestres« Bien qu’il puisse paraître que, dans un tel sujet, il n’y ait aucune limite nécessaire au libre essor de l’imagination ;
que, lorsqu’il s’agit de définir les propriétés des habitants des mondes lointains, on ait le droit de lâcher la bride à la fantaisie,
avec plus d’abandon même que le peintre qui veut figurer les plantes et les animaux de terres inconnues, et que tout ce qu’on voudra
penser de ces habitants  ne puisse être ni démontré ni contredit ;
pourtant faut-il avouer que, de la distance des astres au Soleil, naissent certains rapports qui exercent une influence essentielle sur
les facultés des êtres pensants qui y sont placés […]
[1].

Emmanuel Kant voyait en l’extra-terrestre un modèle pour l’imagination en même temps qu’un outil conceptuel pour penser la justice universelle. En rapprochant certains écrits de jeunesse du philosophe, Peter Szendy, dans son brillant essai Kant chez les extra-terrestres, voit en l’extra-terrestre kantien une vision de l’altérité par excellence lui permettant une « philosofiction du tout autre »[2]. En prenant pour point de départ ce recours à l’imagination artistique impliqué par la pensée de l’extra-terrestre kantien, nous souhaiterions interroger les rapports de l’art et de la science-fiction. Comment l’art pense l’extra-terrestre ou avec l’extra-terrestre ? Comment l’extra-terrestre se présente comme une source inépuisable de problèmes et d’expérimentation posés aux images et aux œuvres d’art ?

D’emblée, ce numéro, ouvert aux chercheurs de toutes disciplines se pense dans une perspective historique longue. On envisage immédiatement la science-fiction ou ses ancêtres scientifiction et merveilleux fantastique comme source d’inspiration pour l’art contemporain, mais la théorie des anciens astronautes, étudiée par Wiktor Stoczkowski [3], a d’abord été fondée sur une étude des restes archéologiques préhistoriques et antiques.
Une partie de l’art spirite, regroupé à l’époque de Dubuffet au grand ensemble de l’art brut fait part de communication avec les habitants d’autres planètes. Représenter les paysages de Mars a été pour Elise Müller (dite Helen Smith), l’impulsion du début de sa carrière artistique[4].
Encore, l’afrofuturisme a déplacé la question post-coloniale jusque dans l’espace, et autour de la figure de Sun Ra, a provoqué des rencontres fertiles inédites entre art musique et cinéma.
Les artistes contemporains tels que Dominique Gonzales-Foerster, Susan Hiller, João Maria Gusmão et Pedro Paiva, Kapwani Kiwanga, Mihut Boscu, Ernesto Sartori ont contribué à donner autre image, souvent complexe, à cet autre par excellence qu’est l’extra-terrestre.

Alors que les publications portant sur la question du post-ou trans-humanisme se sont multipliées ces dernières années, ce numéro pluridisciplinaire, envisage de mettre de côté l’humain et ses transformations potentielles, pour s’intéresser aux non-humains. Ce numéro envisage de mettre en dialogue les contributions de l’anthropologie à l’histoire en passant par l’histoire de l’art, la philosophie, et les études de parasciences ou Pulp sciences, ainsi que les a baptisées Pierre Lagrange [5].

Notes
[1] Emmanuel Kant, Histoire générale et théorie du ciel, appendice sur les habitants des astres, Traduction par C. Wolf. Gauthier-Villars, 1886. Comme nombreux de ses contemporains, Kant pensait la pluralité des mondes, et plus encore, il y voyait la perspective d’un outil conceptuel : « Mon opinion est qu’il n’est pas absolument nécessaire de croire que toutes les planètes sont habitées, quoiqu’il soit absurde de le nier pour toutes ou du moins pour le plus grand nombre d’entre elles », ibid.
[2] Peter Szendy, Kant chez les extra-terrestres, Editions de Minuit, Paris, 2011
[3]Des hommes, des dieux et des extraterrestres. Ethnologie d’une croyance moderne, Paris, Flammarion, 1999
[4] Cf. Théodore Flournoy, Des Indes à la Planète Mars, introduction par Marina Yaguello et Mireille Cifali. Paris, Seuil, 1983, et « Nouvelles observations sur un cas de somnambulisme avec glossolalie », Archives de psychologie, tome 1, Genève, 1901
[5] « Science-parascience : preuves et épreuves », numéro spécial d’Ethnologie française (revue du Centre d’Ethnologie française, CNRS, éd. Armand Colin), septembre 1993, sous la direction de Pierre Lagrange.

Modalités de soumission
Les articles (95000 signes max., espaces compris) devront être envoyés à hervemaillet@yahoo.fr accompagnés d’un résumé en français et en anglais (10/15 lignes) et de 3 à 5 mots-clés en français et en anglais avant le 15 septembre 2016.

Les propositions d’articles seront étudiées à condition de comporter entre 10000 et 12000 signes (espaces compris) et d’être envoyées avant le 30 juin 2016 (NB : l’acceptation d’une proposition d’article ne dispense pas de la soumission définitive de l’article au comité scientifique).

Préparé à l’occasion de Journées d’études à l’ESACM (cole Supérieure d’Art de Clermont Métropole) en 2014, dans le cadre de la Coopérative de recherche 2014/2015, ce numéro s’ouvre aussi bien aux contributions d’auteurs présents lors de ces journées d’études qu’à d’autres propositions.

Comité scientifique
Jacques Aumont, professeur à Paris III et directeur d’études à l’EHESS (Centre d’Histoire et Théorie des Arts)
Mieke Bal, professeure à l’ASCA (Amsterdam School of Cultural Analysis), Université d’Amsterdam
Jérôme Baschet, maître de conférences à l’EHESS (Groupe d’Anthropologie Historique de l’Occident Médiéval)
Jacques-Olivier Bégot, maître de conférences à l’UFR Lettres Arts Cinéma de l’université Paris Diderot – Paris 7
Gottfried Boehm, professeur à l’Université de Bâle
Jean-Claude Bonne, directeur d’étude à l’EHESS (Centre d’Histoire et Théorie des Arts)
Maurice Brock, professeur à Université François Rabelais de Tours et directeur du Centre d’études sur la Renaissance
Giovanni Careri, directeur d’études à l’EHESS et directeur du Centre d’Histoire et Théorie des Arts, responsable administratif et juridique d’Images Re-vues
Guilllaume Cassegrain, maître de conférence à Lyon II
Enrico Castelnuovo, professeur honoraire de la Scuola Normale Superiore de Pise et de l’Université de Lausanne
Danièle Cohn, professeure d’esthétique et de philosophie de l’art à Paris I
Philippe Dagen, professeur à Paris I et directeur de l’école doctorale
Brigitte Derlon, ethnologue, maître de conférences à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (LAS)
André Gunthert, maître de conférences à l’EHESS (Centre d’Histoire et Théorie des Arts)
Valérie Huet, professeure d’histoire ancienne à l’Université de Bretagne Occidentale
Monique Jeudy-Ballini, ethnologue, directrice de recherche au CNRS (LAS)
Catherine Jolivet-Lévy, professeure à Paris I
François Lissarrague, directeur d’études à l’EHESS
Ivonne Manfrini, professeure d’histoire de l’art à la Haute Ecole d’Art Design/domaine arts visuels de Genève et membre associée du Centre Louis Gernet
Eric Michaud, directeur d’études à l’EHESS (Centre d’Histoire et Théorie des Arts)
Pietro Montani, professeur à la Facoltà di filosofia dell’ Università di Roma La Sapienza
Anca Oroveanu, professeure à l’Université de Bucarest et directeur scientifique au New Europe College de Bucarest
Andrea Pinotti, Maître de conférences à l’Université de Milan
Daniel Russo, professeur à l’Université de Bourgogne
Jean-Marie Schaeffer, directeur de recherche au CNRS et directeur d’études à l’EHESS, directeur du Centre de recherche sur les arts et le langage
Jean-Claude Schmitt, directeur d’études à l’EHESS et directeur du Groupe d’Anthropologie Historique de l’Occident Médiéval
Salvatore Settis, directeur de la Scuola Normale Superiore de Pise
Carlo Severi, directeur d’études à l’EHESS (Laboratoire d’anthropologie sociale)
Luc Vancheri, maître de conférences à l’Université Lumière Lyon 2
Anca Vasiliu, chargée de recherche au CNRS (Centre d’Histoire des Sciences et de Philosophie Arabes et Médiévales) et chargée de cours à Paris X Nanterre
Bernard Vouilloux, professeur à Paris IV

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